of things invisible to mortal sight

Galerie Mansart, 5 rue Payenne, 75003 Paris
du 11 au 25 Novembre 2018

Expo KOH - Galerie Mansart - 2018expo-katherine008-2expo-katherine004

“Posé sur la table de l’atelier de l’artiste, un livre d’Hubert Damisch Théorie du nuage, pour une histoire de la peinture… Katherine Oh continue d’explorer sensiblement les cieux, les espaces mentaux et éthériques.
Le titre de son exposition est extrait du livre III du poème Paradise Lost de John Milton, que Chateaubriand traduisit par : « des choses invisibles à l’œil mortel ». La peintre reste imprégnée de l’éducation religieuse reçue dans son enfance. Dante, Milton et Blake sont en ce sens des référents. Ils envisagent le christianisme comme support pour exprimer des questionnements contemporains et fondamentaux. Ici la question posée à nous autres mortels, c’est notre quête de l’invisible.

Dans la Galerie Mansart, disposition des toiles, nature des formats, variations des teintes et surgissement du figuratif composent un parcours narratif pour le spectateur.

D’un côté, des petits formats pensés comme autant de fenêtres. Ce sont des aperçus d’espaces harmonieux, des moments idéaux où tout tend vers la perfection. Des petits morceaux d’infini. Ces instants où tout concorde dans la beauté des êtres et des choses. Des temps d’équilibre qui font échos aux inévitables bascules du pas assez ou du trop.

Nous sommes invités à regarder à travers ces lucarnes de plénitude. En nous retournant, l’impression est autre. Les grands formats aspirent le regardant. L’espace englobant et vibrant de la toile est réflexif, il incite à plonger en nous même, au cheminement intérieur. Les deux polarités du clair et de l’obscure ne sont pas antinomiques, ni manichéennes. Elles sont les parties d’un tout, deux états différents, que l’on traverse dans une succession de moments, confie l’artiste. Ce qui importe, c’est le voyage. La nuit peut être lumineuse et le jour assombri.

Entre ces deux polarités, émerge un enfant. Est-ce lui qui sort du ciel vers notre monde ? Ou bien jette-t-il un regard vers notre réalité avant de s’en retourner vers la sienne ? De disparaître inexorablement ? Est-ce nous qui avons juste un aperçu de la beauté du lieu où il réside ? Mystère de la naissance. Part d’enfance. La fente est métaphore sexuelle et métaphysique. Le ciel s’ouvre et se ferme.

En se déplaçant vers le fond, le silence est de mise. Katherine Oh, dans ces moyens formats, cherche l’infime moment de suspens entre inspire et expire. Ce temps calme, éphémère, neutre et plein, dans la course des choses.

Le temps est au cœur du travail de l’artiste et intégré dans son processus de création.

Quand la peintre approche une toile, elle se demande à quelle heure de la journée elle va déployer son geste, elle prend en considération la saison traversée et surtout la température qu’elle ressent. A l’instar de l’épigénétique, elle active telle ou telle recherche tonale et s’exprime différemment en fonction de facteurs environnementaux. Katherine Oh est tout à l’instant dont elle prend pleinement conscience. Elle s’en imprègne pour enclencher son geste. Les aires mentales qu’elle déploie sont issues d’un ressenti physique. Le sensible guide l’artiste pour peindre d’intelligibles espaces.

Chacune de ses toiles s’inscrit dans de multiples temporalités. Elle peint par couches successives qui sont autant de strates composant une archéologie d’instants. En fonction de la température ressentie, elle choisit sa gamme chromatique, son format, et se laisse aller à ce qui va se révéler sur la toile. Son geste achevé, elle se demande : « Qu’est-ce qui manque ? » Ainsi ses toiles sont toujours en devenir, elle y retravaille sans cesse. Le tableau passe par des états successifs, qui ne sont que des moments dans la vie de l’œuvre. Ce qui lui donne sa forme définitive, c’est sa sortie d’atelier pour entrer chez quelqu’un d’autre. Certaines toiles céruléennes ont été jaunes. Dix ans auparavant parfois.

C’est ce travail de captation du temps traversé qui vibre dans les toiles de Katherine Oh. Entre infini et finitude.”

Galerie Mansart